Chroniques Pyrénéennes : Aller et retour, récit d’un stage par ses karatékas
Dans un petit village perdu dans la montagne nommée Sainte Croix Volvestre, dont les Pyrénées sont les plus éminentes gardiennes, court une légende connue uniquement des anciens. Celle-ci raconte qu’une fois l’an, pendant la période la plus chaude de l’année, un gîte se trouvant non loin abriterait durant une longue semaine d’étranges voyageurs vêtus de blanc. Ces derniers, sous la direction de leurs deux maîtres, passeraient leur temps les pieds dans l’herbe à se mouvoir et à crier vers le ciel. Avant de repartir comme ils sont venus, laissant les habitants de Sainte Croix dans l’attente de l’échéance à venir. Cette légende est-elle vraie ? A vous de le découvrir.
Cette année encore, et pour l’officieuse dixième édition (le covid ayant évidemment empêché le stage durant cette période) l’école Shin Kyo Budo organisait avec ses adhérents adultes une semaine de stage dans les Pyrénées durant le mois d’août, afin de clôturer officiellement la saison. Celui-ci se déroula du Samedi 27 juillet 2024 au Samedi suivant, le 03 août 2024.
L’occasion pour tous d’apprendre durant cette semaine intensive sous la directive de Bertrands Weiss, 7ème Dan IMAF Kyoshi japon, qui nous offre le privilège de ses enseignements et de sa présence, ainsi que de notre cher Sensei Jean-Baptiste Chikhi-Budjeia, 5ème Dan DNBK et FFK, Renshi. Tous deux ont eu à cœur de nous transmettre la voie et de nous aider à corriger notre maîtrise en vue de progresser durant cette courte période.
Chroniques pyrénéennes jour 1 (27/07/2024) : Onigirazu et répartition des chambres
Avec un départ prévu à 10h depuis le complexe sportif du Val de l’Arc, une ambiance d’impatience générale et des voitures bien trop remplies, nous étions fin prêt à affronter les huit heures de route promises sous la chaleur. Après une pause déjeuner (merci Cédric pour le pique nique) et une pause café peu avant l’arrivée parce qu’il faut penser à ses priorités, nous arrivons enfin sur le site d’Al Camparol au terme d’une course effrénée. Les coutumiers de ce stage savoure le retour en ce lieux, tandis que les petits nouveaux ont le privilège de s’extasier une première fois de ce paysage.
Après un rapide « défaisage » des sacs et un baptême de la piscine, l’arrivée de notre Sensei Bertrand Weiss marque à elle seule le début officiel de ce summer camp 2024. Le soir, nous avons eu le privilège de déguster un plat de pâtes bolognaise préparé par le bureau, et surtout de découvrir ce que tant on attendu avec impatience: nos armoiries pour cette semaine de stage, les T-shirt « designés » par Emilie !
Enfin, avec toutes les ovations qu’elle mérite, nous avons découvert la chanson A ki ki est le kiai créé par notre Président (avec l’aide minime d’un IA) afin d’accompagner le premier jeu de ce stage, et également d’en clore la première soirée.
Chroniques Pyrénéennes jour 2 (28/07/2024): premier réveil et premiers coups (et on en redemande).
Le premier réveil à Al Camparol se fit avec motivation et entrain (et un peu grâce à l’odeur du café préparé par les lève-tôt), pour contempler les montagnes qui se révèlent pour la première fois à nous, dévêtues de brume. Après un solide petit déjeuner, nous voilà en tenue sur le terrain et les pieds dans l’herbe à 8h et demi pour le premier entraînement. Quelle joie et quel doux bonheur de commencer par un peu de préparation physique afin d’assimiler pleinement ce qui nous attendait par la suite, sous un soleil qui se lève doucement et la chaleur qui s’abat avec un petit ricanement à notre intention.
Nous enchaînons ensuite avec un peu de Kihon dans le but de mobiliser nos hanches et de fluidifier nos déplacements. Galvanisés par ce premier pas sur ce que sera notre semaine, certains poursuivent un entraînement en solitaire tandis que la team cuisine s’éclipse afin d’accomplir son devoir. Le repas se déroule sous le signe de l’engouement et des odeurs de transpiration, suivi d’une longue pause afin d’attendre le retour des températures plus fraîches, pauses que certains mettent à contribution pour se faire masser la tête.
17h voit arriver la reprise, qui suivra le schéma de la matinée. Enfin la fraîcheur retombe sur l’apéro et le repas du soir que nous sommes bien en mal d’écourter, et qui verra la soirée se poursuivre jusqu’à des heures indécentes avant qu’enfin le calme ne retombe.
Chroniques Pyrénéennes jour 3 (29/07/2024): Mises à contribution et Méli-Mélo.
Toujours sous la bonne odeur de café et la fraîcheur salutaire matinale, nous nous retrouvons au petit jour en serrant les dents dans l’attente de ce qui est annoncé comme la journée la plus chaude de notre semaine. Déjà transpirant sous nos keikogi, nous partons pour une journée axée sur le travail de jambes ainsi que le début du travail par deux, donnant lieu à des échanges de partenaires et surtout de coup de pieds en toute civilité bien entendu, ainsi que l’appréhension du terrain irrégulier qui ajoute une touche de défis dans le simple fait de rester debout, et qui offre un apprentissage d’adaptation.
Enfin, nos gradés en ayant marre d’être les seuls à nous gérer, nos ceintures marrons sont mises à contribution afin de parfaire leurs aptitudes d’enseignement et de donner à Bertrand Sensei l’occasion d’observer leur façon d’inspirer les kohaï. Le milieu de l’après-midi voit l’arrivée de Laetitia et Maëlle, ce qui nous permet d’être enfin au complet, ainsi que la première expédition course, où les « choisis » vont devoir affronter les profondeurs de la forêt pour partir chasser les futurs repas. Ou, présenté plus simplement, faire un aller retour à Intermarché, ce qui représente un retour éprouvant à la civilisation.
Pour l’entraînement du soir, nous avons la chance de pouvoir faire usage du dojo à dessein d’éviter la canicule, et surtout de découvrir l’endroit où auront lieu les passages de ceintures. Enfin, après le traditionnel apéro et le repas du soir, certains karatékas choisissent de profiter de la vue des étoiles. Et c’est sous la vision époustouflante de la voie lactée, d’une pureté rare qu’offre uniquement la montagne, que se clôt la troisième journée de stage.
Chroniques Pyrénéennes jour 4 (30/07/2024) : Katas et dragons.
C’est sur une matinée brumeuse que les karatékas se lèvent, constatant la disparition des Pyrénées sous un ciel gris d’enfer qui pourrait aussi bien dissimuler une bataille épique entre dragons et humains. Nous attaquons l’entraînement sous la pluie par un travail de gestion des distances de combats et de la prise d’initiative grâce à un exercice basé sur une parade, suivi de l’emblématique technique du gyaku zuki.
L’après midi nous voit nous diviser en différents groupes afin de travailler nos Katas, et que les ceintures marrons puissent également se pencher un peu plus longuement sur la préparation de leur premier Dan. Ceintures blanches et jaunes d’un côté, vertes et oranges de l’autre, et les katas respectifs travaillés sous plusieurs formes afin de bien en assimiler les mouvements et y ajouter la fluidité nécessaire. La soirée est dédiée à une redéfinition des notions de gravité par une tours de kaplas qui poursuivra son ascension sur plusieurs jours, mais jusqu’où tiendra-t-elle ?…
Chroniques Pyrénéennes jour 5 (31/07/2024): Demi-Lune
Nous attaquons la journée par l’apprentissage et la pratique d’un Kata supérieur : Hangetsu, qui signifie demi lune. Il repose sur un placement de pieds particulier dans une position qui lui donne son nom, que certains découvrent et pratiquent pour la première fois. Il mélange respiratoire et explosivité, qui sont les deux faces du karaté tant dans sa pratique que dans sa philosophie, et est l’un des Katas de prédilection de Bertrand Senseï, ce qui le rend d’autant plus intéressant à apprendre sous sa tutelle.
Après une pause piscine bien mérité, vient l’heure de la sieste et surtout de la poursuite de l’atelier kapla, mais malheureusement la première merveille d’Al Camparol n’était pas destinée à durer, puisque les plus belles choses sont éphémères, et elle connue une fin tragique alors que l’objectif inatteignable du plafond n’était plus qu’à quelques centimètres.
L’entraînement de l’après-midi est basé sur une mise en pratique des bunkais inspiré du kata Hangetsu, qui se traduit par un travails d’esquive et de rotation suivis d’un empi, là encore un intéressant défi à réaliser sur l’herbe, bien que les pieds aguerris des karatékas aient déjà su s’adapter au terrains comme s’il s’agissait de notre dojo. Attention aux coudes dans l’œil cela dit.
La soirée laissera place à la nuit dans une énième veillée guidée par la bonne humeur qui caractérise sans aucun doute nos moments de convivialité, soulignant subtilement l’importance de la balance qui existe entre l’impeccable sérieux de nos entraînements et ces moments de relâchement qui nous permettent de mieux nous connaître.
Chroniques Pyrénéennes jour 6 (01/08/2024) : Vous connaissez la blague du cheval, du loup-garou et du barbecue ?
La fin approche ! Et avec elle, l’évaluation du passage de ceinture. Ce matin, un groupe guidé par Juan notre hôte est parti faire une chevauché dans la nature, tandis que les ceintures marrons préparaient leurs examens en faisant travailler les ceintures de couleurs pour le leur. Les Senseïs ont ainsi pu se concentrer sur le travail de nos deux ceintures noires pour leur présentation du lendemain.
La pause déjeuner ne contenant que peu d’éléments emblématiques, nous enchaînons directement sur l’entraînement de l’après-midi axé sur la préparation aux passages de grades sous l’œil observateur des gradés tandis qu’une seconde équipe allait mettre à l’épreuve ses talents équestres. Travail de Kihon, révision des Katas et un peu de kumite, tout y est passé et fut surtout suivi d’un partage de conseils dans le but d’accueillir au mieux cette étape sur la voie.
Mais la meilleure mise en condition se fit lors de la soirée, autour d’un barbecue géré avec brio puisque le gîte était toujours là par la suite, allumé par le feu du dragon et surtout alimenté avec beaucoup de carton. Et enfin fut venu le moment que certains attendaient depuis des mois, l’ayant entendu comme on murmure un mythe, dans la crainte et l’excitation. Le temps du loup-garou… Notre maître du jeu est venu nous chercher. Au début ce n’était que des grincement dans la nuit qui s’étiraient peu à peu. Et puis un appel, une prière à la chasse. Il a surgit de l’ombre, vêtu de son grand manteau, appuyé sur son bâton recourbé et marmonnant des paroles incompréhensibles. Oui, c’était bel et bien JB Senseï enroulé dans un plaid qui nous faisait signe de regagner l’intérieur où il nous a tous assis en cercle. Les règles furent expliquées, les cartes distribuées, et enfin le jeu put commencer. Pour finalement se finir dans un bain de sang et une victoire écrasante des Loups, Émilie et Yannick. Un oeil attentif constatera bientôt qu’il s’agissait peut-être d’un signe avant-coureur des évènements à venir…
Chroniques Pyrénéennes jour 7 (02/08/2024) : Danse et larmes.
Le jour était enfin (où pas) arrivé. Un peu de stress mais surtout une solide détermination et peut-être un léger manque de sommeil pouvaient se lire sur les visages. Nous étions aussi prêts que nous pouvions l’être, ou tout du moins était-ce trop tard pour changer les choses ? Afin de ne pas axer notre esprit uniquement sur les évaluations à venir, l’entraînement de la matinée s’est déroulé sous la forme de l’apprentissage d’un nouveau kata supérieur : Sanchin. Un kata respiratoire qui demande un ancrage et une contraction permanente du corps. Bertrand Senseï nous à ensuite fait une impressionnante démonstration de sa technique en kobudo en nous présentant un kata de nunchaku que nous avons également dû apprendre, avec plus où moins de maîtrise et de classe selon le niveau et peut-être le talent.
Le repas de midi fut plus détendu que ce à quoi nous aurions pu nous attendre, et après une pause plus courte que d’ordinaire, l’heure était venue. Nous tournions en rond devant le dojo, chacun gérant l’appréhension à sa manière. Des expressions fermées ici et là, quelques visages détendus rodés par l’habitude ou bien la maîtrise de ses émotions. Et puis, avant que nous n’ayons pu le réaliser, nous étions sur le parquet à saluer face à nos Senseïs, avant de ressortir pour entrer de nouveau tour à tour. Puis, à l’image de celle qui précéda chaque épreuve, l’attente. La plupart se détournèrent, choisissant de concentrer leur esprit sur autre chose, tandis que d’autres ressassaient leur passage gardant un œil sur les suivants, se demandant ce qu’ils auraient pu améliorer. Les dernières minutes d’attente furent les plus insoutenables, ponctuées d’allers-retours, et attendant le message annonçant la fin du passage des gradés. Enfin, nous étions de nouveau alignés. Après quelques mots, les Senseïs ont annoncé les noms, un par un, suivi du grade obtenu et d’une chose relevée à améliorer. Au grand soulagement général, et même s’il ne s’agissait pas toujours de la couleur espérée, chacun vit sa progression récompensée par changement de ceinture. Mais aucune émotion, ni aucune attente, n’était plus intense que celle qui précéda les annonces des passages de Dan. Yannick devait valider son premier, Emilie présenter un passage blanc qui orienterait probablement son véritable examen l’année suivante. Pour avoir travaillé avec eux durant un an voire beaucoup plus, nous leur souhaitions tous de réussir et de voir Yannick arborer sa ceinture noire dès la rentrée. Ce qui arriverait, puisqu’après une rapide précision pour les moins gradés auxquels le terme de shodan (début de la voie des Dan) avait échappé, Bertrand Senseï précisa d’une voix forte : Ceinture Noire ! Les applaudissements retentirent, à secouer les lattes du plancher, et lorsqu’ils se calmèrent, le Senseï se tourna vers Emilie. Après lui avoir adressé ses félicitations, la fin de sa phrase se noya sans que personne n’en ait pleinement saisi le sens. Le doute sur le visage des gradés, alors plus proches, aurait dû induire la suite à tout le monde. Il répéta alors une nouvelle fois, cette fois en s’assurant que tout le monde l’avait entendu : Emilie, Ceinture Noire ! L’incompréhension sur son visage aurait pu rivaliser avec le nouvel éclat qui fit trembler le dôme. Assurant qu’elle méritait son grade sans avoir à attendre un an supplémentaire, JB Senseï la fit à son tour avancer jusqu’au centre du dojo afin de clore ce passage de l’année 2024, sous le regard de fierté de ses nouveaux camarades gradés. Le dernier salut se solda par une ovation générale, des étreintes de bonheur et quelques larmes d’émotion qui faillirent en arracher à l’assemblée.
Afin de terminer ce stage en beauté, un copieux repas nous attendait préparé par nos hôtes. JB nous offrit un discours qui arracha de nouveau plusieurs larmes d’émotion, un discours adressé à Bertrand sur ce qu’il représentait pour lui, et un discours aux nouveaux gradé pour leur souhaiter, avec toute la solennité qui le caractérise, la bienvenue dans le cheminement de la Voie. Mais les larmes furent bien vite séchées lorsque le dojo se transforma en une piste de danse animée, avant que la soirée ne se poursuivent jusque dans le gîte sur la délicate et subtile musique tomber la chemise durant laquelle les karatékas, que rien n’effraie, ont mis du coeur à l’ouvrage afin de respecter les précises directives des paroles. Le fait qu’ils aient un peu abusé sur les digestifs n’ayant évidemment rien à voir avec leur détermination naturelle. Mais il fallut finalement aller dormir, certains se contentant d’un peu de sobriété après cette soirée riche en émotion, d’autre optant pour la formule camp de vacances et soirée pyjamas, mais tous douloureusement conscients qu’il s’agissait-là de leur dernière nuit ainsi, à savourer la proximité les uns des autres, les enseignements quotidiens et l’assaut des trop nombreux insectes.
Chroniques Pyrénéennes jour 8 (03/08/2024) : Aller et retour, récit d’un stage par ses karatékas.
Les réveils sonnèrent sur une ambiance quelque peu morose, en partie balayée par l’urgence de retrouver l’intégralité de ses affaires, et surtout de ranger et de faire le ménage afin de laisser le lieu dans un état nous assurant de pouvoir y revenir l’année suivante. Certains traînaient un peu des pieds, espérant prolonger ce moment autant que possible, sans pour autant cacher la joie de passer enfin une nuit au calme. Et finalement, les uns après les autres, les karatékas de Sainte-Croix-Volvestre s’en retournèrent, abandonnant pieds dans l’herbe et Montages dans la brume, pour retrouver la vraie vie qui les attendait ailleurs… Toujours en gardant à l’esprit que ce n’était que partie remise jusqu’à l’année prochaine, et surtout que la Voie est un apprentissage constant, peu importe où nous nous trouvons.
Merci à nos participants Alexis, Anne-Sophie, Cédric, Céline, Christophe, Dounia-Adeline, Emilie, François, Lou, Louise, Ludo, Morgane, Yannick et Yoana
Merci à Laetitia, Maëlle, Elitsa et Rider pour votre présence.
Merci à nos hôtes Juan, Sol et Yann.
Et surtout un immense merci à nos Senseï, JB pour nous accompagner au quotidien et Bertrand pour prendre le temps de partager ton enseignement avec nous.
Félicitations à tous ! A l’année prochaine, et surtout n’oubliez pas… A KI KI EST LE KIAIIIIIII !
Il est important de préciser qu’aucune personne non consentante ne s’est pris de coup durant cette semaine, à l’exception peut-être de l’araignée de la salle de bain, qui a goûté au terrible et exceptionnel mae geri keage de Bertrand !
Chronique rédigée par Lou Cabon ! Arigato !!!
Et quelques photo de la vie du camp…
Pour les lecteurs les plus assidus ayant parcouru tout l’article et qui meurent d’impatience de découvrir à kiki est le kiai ?